Interdiction de conduire en cas de non-paiement d’une amende : la Cour de cassation rappelle les limites légales

25 mars 2025

Dans un arrêt du 11 février 2025, la Cour de cassation a censuré une décision du tribunal correctionnel de Flandre occidentale (division de Bruges) qui avait ordonné, à titre subsidiaire, le remplacement d’une amende pénale par une interdiction de conduire.

Cette décision met en lumière un rappel fondamental du droit positif : la peine subsidiaire de déchéance du droit de conduire ne peut être appliquée que dans le cadre d’infractions à la législation sur la circulation routière, et non lorsqu’il s’agit de condamnations fondées sur le Code pénal.

Le principe de la peine subsidiaire : une stricte application légale

Deux articles légaux se distinguent dans le traitement du non-paiement d’une amende pénale dans le délai légal de deux mois :

Article 69bis de la loi sur la circulation routière

Pour l’application de la présente loi, par dérogation à l’article 40 du Code pénal, à défaut de paiement dans le délai de deux mois à dater de l’arrêt ou du jugement, s’il est contradictoire, ou de sa signification, s’il est rendu par défaut, l’amende pourra être remplacée par une déchéance du droit de conduire un véhicule à moteur dont la durée sera fixée par le jugement ou l’arrêt de condamnation, et qui n’excédera pas un an et ne pourra être inférieure à huit jours.

Cet article permet aux juridictions répressives, dans les seuls cas d’infraction à la loi sur la circulation routière, de remplacer une amende impayée par une déchéance du droit de conduire, pour une durée comprise entre 8 jours et un an. Il constitue une dérogation ciblée à l’article 40 du Code pénal.

Article 40 du Code pénal

À défaut de paiement dans le délai de deux mois à dater de l’arrêt ou du jugement, s’il est contradictoire, ou de sa signification, s’il est par défaut, l’amende pourra être remplacée par un emprisonnement dont la durée sera fixée par le jugement ou l’arrêt de condamnation, et qui n’excédera pas six mois pour les condamnés à raison de crime, trois mois pour les condamnés à raison de délit, et trois jours pour les condamnés à raison de contravention.
Les condamnés soumis à l’emprisonnement subsidiaire pourront être retenus dans la maison où ils ont subi la peine principale.

S’il n’a été prononcé qu’une amende, l’emprisonnement à subir à défaut de paiement est assimilé à l’emprisonnement correctionnel ou de police, selon le caractère de la condamnation.

Cet article s’applique par défaut à toutes les infractions de droit commun, prévoyant que le non-paiement d’une amende peut entraîner un emprisonnement subsidiaire, dont la durée varie en fonction de la nature de l’infraction.

L’erreur du tribunal correctionnel de Bruges

Dans l’affaire tranchée par la Cour de cassation, le prévenu avait été condamné pour une infraction relevant du Code pénal, et non pour une infraction à la loi sur la circulation routière.

En prévoyant que l’amende non payée pourrait être remplacée par une interdiction de conduire, le tribunal a appliqué une peine subsidiaire étrangère au régime applicable, en transposant à tort l’article 69bis dans un contexte qui relevait exclusivement de l’article 40 du Code pénal.

La Cour de cassation a donc cassé l’arrêt, rappelant que seule la peine d’emprisonnement subsidiaire était légalement envisageable dans ce cas.

Conséquences pratiques et importance pour les juridictions

Cet arrêt illustre l’importance du respect strict du champ d’application des sanctions subsidiaires. La peine de déchéance du droit de conduire ne peut être ordonnée que dans les cas expressément prévus par la législation routière.

Pour les juridictions, il s’agit d’un rappel de la hiérarchie et de la spécialisation des textes applicables. Pour les prévenus comme pour les praticiens du droit, cet arrêt offre une sécurité juridique renforcée en matière de sanctions pécuniaires et de leur exécution.


Conclusion

L’arrêt du 11 février 2025 témoigne une fois de plus du rôle de la Cour de cassation comme gardienne de la légalité pénale. En matière de sanctions subsidiaires, chaque cadre législatif dispose de son propre régime, et leur confusion peut entraîner la censure d’une décision pourtant motivée.

Le cabinet Derenne & Associés se tient à disposition pour analyser toute situation relative aux sanctions pénales, aux procédures en matière de circulation routière, ou à l’exécution des peines en général.

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